ProNews
Les créations d’entreprises au Maroc ont chuté de 12% en 2020
18 mars 2021 Le Boursier
Le nombre de créations d’entreprises a baissé en 2020 suite aux restrictions de déplacements et aux mesures de confinement ayant paralysé l’appareil administratif.
D’après les chiffres du baromètre des créations d’entreprises de l’Office Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC), le nombre des créations d’entreprises en 2020 a baissé de 11,7% par rapport à l’année 2019. Entre les entreprises personnes physiques et les personnes morales, on dénombre un total de 83 806 entreprises créées.
39% des créations d’entreprises concernent le secteur du commerce, 16,98% le secteur du BTP et activités immobilières, et 15,86% les services divers. En 2019, le commerce regroupait 41,96% des créations d’entreprises, suivi des services divers avec 17,06% et le BTP avec 16,08%.
Sur le plan géographique, la crise a affecté les régions de façon inégale. Les régions de Casablanca-Settat et Rabat-Salé-Kenitra ont bien résisté malgré la mauvaise conjoncture. Respectivement, les créations d’entreprises ont reculé de 2% et 2,8% en 2020. En revanche, la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima a subi une forte chute de 36,5% avec 10 773 entreprises créées en 2020. Il en est de même pour la région de l’Oriental qui a vu le nombre de créations d’entreprise diminuer de 31% avec 5 504 créations.
Une accélération des créations d’entreprises suite aux pertes d’emplois
La création d’entreprises en 2020 a naturellement été affectée par la crise sanitaire et économique. Notamment à cause des restrictions de déplacement et de la paralysie de l’appareil administratif pendant une durée de trois mois.
Cependant, lors du dernier trimestre de l’année et malgré la mauvaise conjoncture économique, le nombre de créations d’entreprises a bien repris. Alors que la baisse des créations d’entreprises était de 20,4% à fin septembre 2020 par rapport à la même période l’année précédente, l’année a été clôturée sur baisse de 12%, traduisant un bon dynamisme de fin d’année.
Fin d’année 2020, Amine Diouri, directeur des études et de la communication chez Inforisk D&B nous expliquait que deux courant de pensée se dessinaient. Temporiser l'acte de création d'entreprise le temps que la crise passe ou le concrétiser comme alternative. Visiblement, la seconde option a été choisie.
« Entre septembre et décembre, il est vrai que nous observons des hausses assez importantes. Même historiquement, quand on compare cette période par rapport à 2019, les créations étaient supérieures en 2020. Il y a donc eu un effet rattrapage assez important » nous explique Amine Diouri. D’ailleurs, d’après les chiffres de l’OMPIC, sur la période septembre-décembre 2020, 36 685 entreprises ont été créées contre 32 468 sur la même période en 2019, soit une hausse de 13%.
Un dynamisme de fin d’année qui s’explique également par la nécessité pour des personnes en difficulté suite à des pertes d’emploi, de retrouver une activité. « Je pense également que la crise a eu un effet de transmission vers la création d’entreprise. Nous estimons que 30% des entreprises ont dû licencier en 2020. Donc l’idée pour beaucoup de gens a été de ne pas perdre totalement leurs sources de revenus. Sachant que le marché de l’emploi n’était pas propice, la création d’entreprises a été un des moyens de retour à l’activité. Il est à noter que le programme Intelaka mis en place début 2020 a également contribué à cette forte reprise des créations d’entreprises vers la fin de l’année » explique Amine Diouri.
Une hausse des créations d’entreprises personnes morales
Malgré la baisse de créations d’entreprises en 2020, les créations d’entreprises personnes morales ont augmenté. Leur nombre est en hausse de 7,5% par rapport à l’année 2019 à 54 691 créations. De leur côté, les créations d’entreprises personnes physiques ont fortement diminué sur l’année. Avec un total de 29 115 créations, leur nombre a chuté de 34%.
Pour Amine Diouri, difficile de trouver une explication, mais le principal facteur peut être lié à la mitigation du risque. « Je pense que la raison de l’évolution des entreprises personnes morales réside dans le fait qu’il y a la possibilité de séparer le patrimoine personnel du patrimoine de l’entreprise. Il y a donc moins de risque que quand on adopte une entreprise personne physique où les deux patrimoines sont mélangés » explique-t-il.
Une évolution qui s’explique également par la plus grande facilité de recours à du financement dans une période de crise. « Pour bénéficier des différents modes de financement aux entreprises mis en place durant la crise, comme Damane Oxygène ou Damane Relance, je pense que les prêts aux personnes morales ont été plus faciles à obtenir ce qui a pu favoriser la création de ce format d’entreprise » poursuit notre interlocuteur.
La survie plutôt que la création d’emploi
Si une forte dynamique de création d’entreprise s’est installée durant le quatrième trimestre 2020, il est nécessaire pour notre interlocuteur d’en rappeler les natures. « Il faut savoir qu’il y a différentes raisons à la création d’entreprises. Il y a des secteurs porteurs à forte valeur ajoutée qui bénéficient de la crise, où il y a des opportunités » explique-t-il.
Mais malheureusement, la hausse des créations d’entreprises constatées en fin d’année ne concerne pas des secteurs à forte valeur ajoutée. « Je pense que la majorité des créations d’entreprises ne portent pas là-dessus. L’essentiel est lié à une perte d’emploi et une nécessité de retrouver une activité financière. Il s’agit d’entreprises qui permettent la survie et non la création pérenne d’emplois » précise Amine Diouri.
Pour lui, en 2021, la santé des entreprises et du marché de l’emploi seront de forts indicateurs. « C’est encore difficile à dire, mais cela dépendra de la croissance des entreprises. En 2020, nombre d’entre elles ont dû licencier. Si la situation économique reprend, s’il y a un certain optimisme des chefs d’entreprises et une bonne dynamique de création d’emplois, je pense que ça n’aura pas le même impact sur la création d’entreprise. A contrario, si la situation économique s’aggrave et que les entreprises licencient, le besoin de trouver un revenu de substitution poussera les gens à passer à la création d’entreprise », conclut notre interlocuteur.
Retrouvez cet article sur Le Boursier